Le pitch
SERVICES GÉNÉRAUX est un bureau de création multidisciplinaire, qui mêle une sensibilité artistique et technique radicale, pour donner vie à des récits visuels pertinents.
Cette pratique et ce savoir-faire de la création de contenu et d’expériences visuels - que ce soit des images, des objets ou des espaces -, sont mis au service des marques, agences, institutions et artistes internationaux.
Quel est selon vous votre unfair advantage, ce quelque chose que vos concurrents ne possèdent pas, qui n'est pas facile à copier ou acquérir ?
On découvre l'expression "unfair advantage", elle est tout à fait pertinente. Valentin (Co-fondateur) et moi nous battons contre les biais de narration, le peu de fois où l'on parle de nous. On ne croit pas tellement en la méritocratie, ni en l'homme providentiel. Ainsi il est difficile de répondre autre chose que "la chance".

Quels sont les grands milestones / dates clés de votre société ?
- Début 2014 : Premières collaborations avec Valentin sur des projets d'architecture-fiction (catastrophiques).
- Fin 2016 : Premier cachet. Projet commercial pour Sonia Rykiel, qui nous a permis de nous tester mutuellement et de se séduire professionnellement. Le projet est un succès. Découlent un certain nombre de projets qui imposent à nous la question très pragmatique de la structure juridique.
- Début 2017 : On formalise le duo et on lui trouve un nom avec une certitude : qu'importe le nom, on le regrettera plus tard (pas encore le cas).
- Été 2017 : Premiers Bureaux. On quitte le sous-sol de Valentin à Pantin pour prendre nos premiers bureaux : l’arrière-salle d'un restaurant, 30m2 Rue de Lancry dans le 10ème. Citons Jacques Chirac pour décrire notre expérience : "Le bruit et les odeurs". On tiendra 4 mois.
- Septembre 2017 : Premier Défilé. On signe sous le nom SG notre premier set design de défilé au calendrier officiel de la PFW, pour Carven, sous l'ère Serge Ruffieux.
- Fin 2017 : Nouveaux Bureaux. On déménage dans des bureaux de 120m2 Rue Charlot dans le 3ème.
- Début 2018 : On recrute notre premier stagiaire, Virgile, un bijou.
- Printemps 2018 : Bildung. On rencontre Isabelle et Simon, des bienfaiteurs bien connus, qui nous aident à aligner nos ambitions et nos envies.
- Eté 2018 : Rencontre avec David Giroire et début de notre collaboration !
- Octobre 2018 : On présente "Autoportrait", un projet personnel de SG, pour se présenter créativement via des objets, des images, un livre. On décide alors que tous les ans, on présentera une exposition artistique libre à Paris, en collaboration avec des artistes et talents que l'on admire.
- Novembre 2018 : On recrute notre premier employé à temps plein, basé au Mexique ! Un bonheur du hasard qui permet à SG de couvrir une grande time-zone.
- Décembre 2018 : Nike. On travaille sur l'anniversaire des 20 ans de la TN avec l'équipe Parisienne de Nike. Un de nos plus gros projets à l'époque : dans un hangar à Montreuil, on recrée une rue francilienne (épicerie, garage, pharmacie, vidéoclub, bancs, lampadaires, plaques d'égouts, tout y passe). Pour ce projet on a aussi réalisé un film hommage à cette sneaker, entièrement réalisé en CGI. Nike ont été les premiers à comprendre notre positionnement multidisciplinaire et nous solliciter pour des projets 360. Ce fut le premier projet d'une superbe relation.
- Mars 2019 : Le procès. On gagne un procès clé dans notre jeune histoire. Un défaut de paiement qui aurait pu coûter la vie à SG.
- Octobre 2019 : On présente "Maison", la deuxième exposition annuelle de SG. Le projet le plus personnel et ambitieux du studio : notre Maison manifeste. Le projet résonne très fort en cette période de confinement.
- Décembre 2019 : La croissance. Une recrudescence d'activité assez conséquente fait fortement grandir le studio, dans tous les sens du terme (travaux, recrutement, évolution artistique et technique). On recrute Victoria, notre Studio Director qui va nous changer la vie
- 2020 : L’équilibre. Le studio compte à ce jour 6 personnes + 2 stagiaires, dispersées sur 3 pays. Après quelques années disons « intenses », nous visons désormais l'équilibre et la sérénité professionnelle.
- Aujourd’hui : Le confinement. SG a eu la chance d'anticiper légèrement le confinement. Chaque membre de l'équipe est installé chez lui avec des machines professionnelles. Le remote-work est le quotidien de SG depuis 2018. Par ailleurs, la nature même de nos productions touche à l'immatériel (Digital, CGI, 3D, etc). SG à donc la chance de continuer à avancer sereinement malgré cette crise.
Donnez-nous quelques chiffres clés ?
- 0 € : Work for free, not for cheap. Au début de SG, nous avions à cœur cette phrase un peu niaise, mais néanmoins intéressante. On était ouverts à tous types de projets, tous types de conditions, tant que c'était intéressant, qu'on pouvait s'y exprimer, et qu'ils s'inscrivaient dans notre ambition (Attention, fuyez tous ces « clients » qui demandent de travailler gratuitement en échange de visibilité).
- 40% : C'est la part de bénéfices qu'on a réinvesti pour la production de nos expositions annuelles. Investissez sur vous-mêmes.

- 2 > 8 : Nous sommes passés de 2 associés à une équipe de 8 en un peu moins de 2 ans. Ça nous semble être une croissance raisonnable, à échelle humaine.
- 12-15 : On souhaiterait que SG ne dépassera jamais un effectif de 12 à 15 personnes.
- 2 : C'est le nombre de mois consécutifs qu'on a réussi à passer sans acheter du matériel informatique pro. La loi de Moore n'est pas notre amie.
Quel est votre objectif à 5 / 10 / 20 ans ?
On ne veut pas grossir, on veut grandir (pour citer Jacquemus). On rêve d'une équipe réduite mais dense, une équipe qui dure, de gens ultra compétents, avec qui on s'entend parfaitement artistiquement et professionnellement.On rêve de continuer à s'ouvrir à l'international.On rêve de projets sains et justes. On rêve de créer du beau et du pertinent.
Parlons Branding et DA ! Comment définiriez-vous votre ligne artistique ? Et comment cela se traduit-il dans votre DA, votre produit / service ?
C'est devenu une blague en interne, mais il y a un mot qui ressort pour parler de notre esthétique, c'est « sharp".
Toute blague à part, ça nous plait. Le mot est beau. Il porte en lui des notions qui nous parlent : aiguiser, raffiner, tranchant, netteté, performance, exigence.
A titre personnel j'utilise souvent le terme "radicalité". L'équipe m'entend souvent dire "ça ne ressemble pas à une décision". J'aime que tous les points d'une image, d'un objet ou d'un espace soient discutés. Ça ne veut pas dire qu'on ne croit pas en la sérendipité ou "les bonheurs du hasard" comme disait Christian Dior. Mais même ces accidents et invités surprise passent au crible de notre réflexion et de notre intuition.
Nous ne sommes pas d'excellents coloristes. Nous sommes des coloristes besogneux. On passe énormément de temps à chercher et tester nos couleurs. Les couleurs de la gamme SG sont le fruits de 2 ans et demi de réflexion par exemple !
Quels outils avez-vous mis en place pour gérer votre production ? Quelles sont les forces et faiblesses de ces outils ?
Notre pratique s'articule autour des machines de calcul que nous utilisons pour rendre nos images en 3D. Elles sont très présentes dans notre quotidien (budget, encombrement, bruit, chaleur). Ça nous rappelle que tout ça est très tangible, et que l'immatérialité du digitale est une chimère.

Néanmoins, force est de constater que SG est un fruit de son temps. Nous avons un employé full-time au Mexique, un autre en Belgique, quand le studio est basé à Paris. Nous avons donc opté comme beaucoup pour des outils de gestion du travail quotidien, très performant, qui permettent de limiter les frictions : Slack, Asana, GSuite, TeamViewer, NAS, Shared Server.
La force est très claire : ces outils nous rendent agiles et mobiles, et augmentent clairement notre performance, surtout dans une période comme celle-ci (télétravail forcé).
La faiblesse réside sans doute dans une rigidité et un manque de sensibilité. Les interactions digitales sont étrangères à la nuance.
Maintenant, parlons acquisition ! Quels sont les 3 canaux marketing les plus performants pour vous ces 12 derniers mois ? Pourquoi ?
1. Ruissellements d'activités passées
On note qu'un certain nombre de nos projets sont des conséquences des projets passés. Que ce soit le bouche à oreille, ou des rencontres, ou des recommandations. il y a là quelque chose d'assez organique.
2. Instagram
Bien sur qu'Instagram est devenue l'épicentre de tout, pour des studios comme nous. Néanmoins on pondère ça. Certes, c'est Instagram qui assure à SG des appels entrants hebdomadaires pour des nouveaux projets. Mais il serait intéressant de mesurer, a posteriori avec un peu de data/expérience, le taux de transformation de ces projets, et leur budget médian.
3. Prospection
Ok boomer ! Rencontrer des gens, discuter, parler de soi et des choses (même via Instagram!) reste et restera un vecteur simple et sain de développer son studio et ses clients.
Quel est le hack marketing dont vous êtes le plus fier ? Et pourquoi ?
Il n'y en a pas donc je prends la question à rebours : choisir un nom de studio qui n'a aucune chance d'être référencé, c'est sans doute pas un conseil que je donnerais aux jeunes talents qui veulent se lancer :)
Quelle est votre North Star metric ? Pourquoi cet indicateur est-il si important ?
Dans notre cas, c'est assez complexe. Lorsqu'il quitte nos mains, notre projet - que ce soit un film, un objet ou un espace - passe souvent entre nombre d'autres mains, avant de rencontrer un public. Néanmoins, il y a un indicateur qui ne trompe pas, c'est quand le client revient.

Comment intégrez-vous la RSE dans votre business ?
Bien loin d'être suffisant - comme tout le monde. On se doute bien que reverser une part des bénéfices à une association après chaque bilan comptable ne va pas changer le monde. Mais on le fait, et avec volonté. La crise sanitaire du COVID19 nous a fait comprendre de façon très claire la responsabilité sociale qu'ont les entrepreneurs vis-à-vis de leurs équipes. Nous essayons modestement d'être responsables, de soutenir nos équipes dans des moments complexes.
Parlons compta ! C'est pas glam mais c'est important... Quels sont vos outils et process pour en faire un truc facile et plaisant ? Quelles sont les forces et faiblesses de ces outils ?
Nous travaillons avec VVE, un cabinet comptable jeune qui comprend la jeune création. Pour être précis, on utilise Factomos, Jenji, et beaucoup de Google Sheets ! "Facile et plaisant", ça me semble ambitieux !
Team building / Management - Comment choisissez-vous vos collaborateurs ? Quel est votre processus d'onboarding ?
Notre pratique multidisciplinaire implique le besoin de gens très compétents, et avec des compétences très spécifiques (3D, CGI, etc). Nous recevons énormément de candidatures de gens très talentueux artistiquement. Mais nous faisons des "Arts Appliqués". En l'occurence appliqués à une industrie, avec des exigences technique et organisationnelles qui dépassent souvent ce que les jeunes créatifs qui se lancent imaginent.

On regrette d'ailleurs que très peu de femmes postulent pour des postes relatifs à la 3D. Le studio est composé quasiment intégralement d'hommes malheureusement.
On essaye de s'entourer de gens qui aiment ce qu'on fait vraiment (Les demandes de stage par mail et Instagram ont triplé lorsqu'on a publié notre film pour Virgil Abloh...) et qui auront plaisir à se dire membres de l’équipe. Notre ambition est de pérenniser l'équipe, c'est un travail à plein temps.
Organisation personnelle - Quels sont les outils que vous utilisez / process de productivité que vous avez réussi à intégrer à votre routine quotidienne ?
Slack est devenu une troisième main. Asana est plutôt un outil pour les cadres, pour avoir un overview.
Y a-t-il des citations ou des mots auxquels vous pensez souvent ou qui guident votre façon de vivre ?
« Le meilleur moment dans l'amour, c'est quand on monte l’escalier » - G. Clémenceau. En effet, rêver des choses est souvent mieux que les faire. Il faut accepter que les choses ne soient pas comme on les rêve, autrement on ne pourra jamais les aimer vraiment.
« Everyone has a plan until they get punched in the mouth » - Mike Tyson. Une phrase qui pousse les control freaks que nous sommes à l'humilité.
« Don't be something for everybody, be everything for somebody » - Je ne sais plus qui. On a coeur de faire les choses pour nous, avec authenticité artistique et bienveillance. Si c'est "genuine" (authentique) votre travail trouvera son public, qu'importe sa taille.
Enfin, un leitmotiv personnel, notre recette du succès : « Success : 1% talent, 9% very hard work, 90% luck. »
Quel est l’un des meilleurs investissements ou l’un des plus rentables que vous ayez jamais fait (temps, argent, énergie, etc.) ?

1. Profiter de ses études au maximum. C'était un luxe inouï d'avoir autant de temps pour soi. Ce ne sont pas vos études qui vous apprendront ce que vous ferez dans la vie. Vos études vous offrent le temps pour trouver ce que vous voulez faire dans la vie, et rencontrer la personne avec qui vous le ferez. Néanmoins je n'ai pas attendu la fin de mes études pour commencer à m'enquérir du marché professionnel dans lequel j'allais évoluer. Valentin et moi avions déjà une activité professionnelle avant d'être diplômés.
2. SG à mis son premier cachet dans un ordinateur très performant. Oui le matériel ne fait pas tout, mais sans matériel on ne fait rien (dans notre métier en tout cas).
3. Quand nous étions étudiants, Valentin m'avait dépanné sur un projet alors qu'on ne se connaissait pas. Pour le remercier j'ai recouvert son bureau de sucreries. Je crois que j'ai marqué des points ce jour-là, et aujourd'hui on est associé.
4. J'étais très proactif étant étudiant. Toujours plein de projets extra-scolaires en cours. Je contactais des artistes, des réalisateurs, pour leur demander d'assister aux tournages, juste pour apprendre. Ce n'est pas glamour, mais il ne faut pas sous-estimer ce qu'un mail sincère peut changer dans vos vies. Je me rappelle littéralement d'un mail envoyé une nuit, après avoir vu une annonce de job Assistant DA chez Céline en 2014. Le lendemain à 9h j'étais dans le bureau de la RH, le lendemain j'étais pris et j'y ai vécu l'expérience la plus formatrice de ma vie.
Avez-vous une curieuse habitude ou une chose inhabituelle que vous adorez ?
Je vais reprendre le terme du brillantissime studio qui m'a donné envie de faire ce métier, le ILL-STUDIO : Fetishistic Scopophilia.
Les images font tout ce que je sais et beaucoup de ce que je suis. Tout est visuel chez moi. J'ai cette obsession de voir. Je collectionne les images, depuis 2014. Trouvées dans la bibliothèque de mes parents, volées dans les moodboards de mes stages passés, et bien sûr venant d'internet. Elles sont toutes classées et taggées dans un outil avec un moteur de recherche qui me permet de les trouver par mot clé. On parle de plusieurs milliers d'images, très soigneusement et strictement sélectionnées. Elles forment un alphabet qui me permet de faire des cahiers d'images pour raconter des nouvelles histoires.
Valentin lui, à un vrai kink pour les technologies industrielles lourdes. Il regarde des vidéos d'inserts en tungstène qui sculptent dans des blocs de métal comme dans du beurre pour s'endormir. Je connais peu de gens qui ont une perceuse à colonne sur leur table de chevet (véridique).
Au cours des 5 dernières années, quels nouveaux comportements, croyances ou habitudes ont le plus amélioré votre vie ?
D'abord, l'humilité et la bienveillance. Ensuite, comprendre que le projet le plus excitant, c'est le suivant ; et que donc il faut prendre du plaisir sur le chemin, pour ne pas être éternellement frustré dans une fuite vers l'avant.
Quel conseil donneriez-vous à un aspirant entrepreneur ?
Considère bien le milieu dans lequel tu veux te lancer, pour comprendre les enjeux, réseaux, mécaniques.
Fais toujours parti de la solution, et non du problème. Ton interlocuteur doit se dire : avec lui à mes côtés, ma vie sera plus simple.
Fais-le pour toi, et uniquement si ça t'anime réellement. Autrement il est impossible d'assumer l'investissement et la charge de travail que ça demande.
Ré-investis sur toi même.
Work for free, not for cheap. Ça demande une bonne intuition et de la chance, mais une collaboration gracieuse bien sentie peu débloquer beaucoup de choses. Ne travaille jamais pour une rémunération "symbolique". Ça ancre une valeur chiffrée dans la tête des gens, et c'est impossible d'en sortir. Alors que si tu travailles gratuitement, tu rends un service, et la personne t'es redevable. La rapport change. (PS: Encore une fois, fuyez ce qui font passer la visibilité pour une monnaie. Si l'interlocuteur n'assume pas qu'il demande une création gratuite, ce n'est pas bon signe).
Personne ne vous attends. Soyez proactif.
Tu ne travailles pas autant que tu le dis.
Paris est petite.
Quelles sont les mauvaises recommandations que vous entendez dans votre métier ou domaine de compétences ?
"Ne jamais travailler gratuitement". C'est plus nuancé que ça.
"Crois en tes rêves et n'abandonne jamais", comme si c'était un dieu méritocrate superstitieux qui avait le verdict final.
"Utilisez des en-têtes de mail farfelus et catchy!" Non.
Depuis ces 5 dernières années, à quoi dites-vous non plus facilement (distractions, invitations, etc.) ? Quelles nouvelles approches ou réflexions vous y ont aidé ? Avez-vous d’autres conseils ?
Tous les vernissages et mondanités. On est mauvais pour ça. C'est peut-être une erreur !
Lorsque vous vous sentez submergé ou déconcentré ou que vous avez temporairement perdu votre objectif de vue, que faites-vous ?
Pour ne pas que ça arrive, nous dinons ensemble un lundi sur deux avec Valentin, pour faire un point stratégique et opérationnel sur le studio. On y parle de "la plomberie" du moment, mais aussi de l'ambition à long terme.
La meilleure façon de marcher tout droit en forêt, c'est de slalomer entre les arbres : ça force à toujours reconsidérer sa direction, et ainsi on continue à garder le cap.
Last but not least, qui souhaiteriez-vous entendre dans mon podcast ?
M/M, Marine Serre.
Aller plus loin : EDLM SCHOOL